Candice Lin
Candice Lin (née à Concord, États-Unis ; vit à Los Angeles, États-Unis) explore les cultures et les histoires inscrites dans les objets et les matériaux reliés au commerce colonial, aux pratiques de guérison alternatives et aux fonctions corporelles. Ses œuvres exposent notamment l’héritage colonialiste et raciste de la virologie et du travail contractuel et prennent la forme d’installations sculpturales multisensorielles dans lesquelles l’artiste utilise des matériaux et des processus vivants, tels que la moisissure, les champignons, les bactéries, la fermentation et les souillures.
Avec l’installation LESBIAN GULLS, DEAD ZONES, SWEAT & T., Lin et Staff mettent en lumière le potentiel subversif de certaines molécules chimiques et retracent la circulation imprévisible des hormones dans nos corps et au-delà. L’œuvre collaborative, constituée de machines à brouillard commerciales piratées, émet ce que les artistes appellent de la fumée hormonale : des effluves à base d’huiles essentielles naturelles anti-androgènes – comme de la réglisse glabre et de l’actée à grappes noires – qui bloquent la sécrétion de testostérone dans le corps. Bien qu’intangibles et presque invisibles, ces nuages fugaces soulignent le pouvoir qu’ont les matières inanimées d’influer sur le vivant. Les hormones, souvent appréhendées comme des éléments stables et déterminants pour la bicatégorisation des sexes, sont en fait en constante évolution autour de nous, reliant entre eux les corps genrés, les substances synthétiques et le « monde naturel ». Empruntant l’apparence des cloisons murales qui caractérisent la charpente de bois des chantiers de construction et contenant divers objets – céramiques, textes érotiques, herbes –, l’installation hexagonale imite la structure atomique d’un anneau de benzène, un composé chimique capable de réguler le comportement des hormones sexuelles et de réagir à son aromatisation. Comme son titre l’indique, LESBIAN GULLS, DEAD ZONES, SWEAT & T. explore l’étroite interdépendance des corps, des écosystèmes et des structures institutionnelles, déboulonnant la dimension péjorative attachée aux notions de contamination, de toxicité et d’échanges interespèces. À travers cette exploration queer de l’hormonothérapie, Lin et Staff recentrent un savoir botanique marginalisé par le colonialisme.